La cybersécurité, un enjeu stratégique pour la stabilité financière au Maroc
Face à des cybermenaces croissantes, la cybersécurité s’impose comme un enjeu stratégique pour la stabilité financière du Maroc. Attaques ciblées, fuites de données, phishing massif… le secteur financier est en première ligne, relève le magazine Finances News Hebdo.
La cybersécurité, un enjeu économique majeur
Dans un entretien avec l’hebdomadaire, Abdeljalil Sadik, consultant en stratégie et gouvernance des systèmes d’information, et expert en cybercriminalité et intelligence artificielle, explique que la cybersécurité n’est plus un simple sujet technique. «La cybersécurité n’est plus juste un sujet technique réservé à quelques spécialistes détachés de la réalité. Elle est aujourd’hui au cœur des stratégies économiques pour les organisations, notamment et surtout les institutions financières», souligne-t-il. Chaque incident peut ébranler la confiance des particuliers, des entreprises et des investisseurs, avec des impacts systémiques sur l’économie nationale.
Les risques liés à la transformation numérique
Sadik rappelle également que la rapidité et l’accessibilité des services numériques comportent des risques. «Banques, assurances, fintechs… tout le monde veut être en ligne, rapide et accessible, le fameux Time to Market. Les paiements mobiles, les applis, c’est le quotidien maintenant. Mais cette vitesse a un revers : quelques clics maladroits et voilà que des comptes sont exposés, voire tout un édifice qui s’effondre», explique-t-il.
Les chiffres alarmants de la cybercriminalité au Maroc
Les chiffres parlent d’eux-mêmes, rapporte Finances News. En 2024, le Maroc a enregistré 6,4 millions de tentatives de phishing et 644 attaques ciblées nécessitant l’intervention directe des équipes de cybersécurité. «Une attaque ne se mesure pas juste en pertes financières, mais aussi en atteinte à la confiance, à l’image, et surtout à la stabilité économique du pays», insiste Sadik.
Les nouvelles techniques des cybercriminels
Selon l’expert, les cyberattaques ne se limitent plus à exploiter une faille isolée. «Les cybercriminels élaborent des scénarios basés sur des technologies et astuces préparées à l’avance pour piéger leurs victimes. Des e-mails frauduleux, des sites ou des applications bancaires fake… autant de techniques malveillantes pour arriver à leur fin», explique-t-il.
L’intelligence artificielle, un facteur aggravant
L’émergence de l’intelligence artificielle représente un facteur d’aggravation des cybermenaces. Sadik met en garde: «Au-delà des scénarios d’attaques traditionnelles désormais bien maîtrisées, s’ajoutent de nouvelles menaces émergentes, amplifiées par l’intelligence artificielle, rapides, peu coûteuses et capables de perturber les systèmes au plus haut niveau».
Les mesures nécessaires pour renforcer la cybersécurité
Pour améliorer sa résilience, Sadik recommande des mesures concrètes. Il est nécessaire d’investir localement, de former des talents localement et de développer des infrastructures marocaines sous contrôle national. Il conviendrait également de miser sur la diaspora marocaine qualifiée pour limiter la fuite des compétences et encourager le retour de ceux ayant acquis une expérience à l’international.
Le Maroc, un potentiel hub de cybersécurité en Afrique
Son objectif est de faire du Maroc un hub de cybersécurité en Afrique. «La cybersécurité n’est pas une option, mais s’impose comme un enjeu vital et un pilier de confiance pour l’économie marocaine. C’est en développant ses propres capacités que le pays pourra non seulement renforcer sa résilience, mais aussi devenir une référence pour l’ensemble du continent africain».
La nécessité d’une législation plus spécifique
Le cadre légal marocain existe mais reste généraliste. «La loi 05-20 sur la cybersécurité de 2020 classe les institutions financières parmi les opérateurs d’importance vitale, avec des obligations de signalement, des mesures de protection et une supervision assurée par la DGSSI. Mais elle manque de détails et n’adresse pas spécifiquement le secteur financier», précise Sadik.