Le dynamisme de l’innovation en Afrique
Sur fond de transformation accélérée, le continent africain affirme de plus en plus sa place sur la carte mondiale de l’innovation. Treize pays africains figurent cette année dans le Global Startup Ecosystem Index (indice mondial de l’écosystème des startups), établi par le cabinet StartupBlink.
Le Maroc s’y classe 9ème au niveau continental et 88ème à l’échelle mondiale, enregistrant au passage la plus forte progression d’Afrique du Nord. Une avancée qui témoigne des efforts déployés pour structurer un écosystème entrepreneurial encore jeune, mais ambitieux, à l’image de son principal hub, Casablanca, en plein essor.

À ce jeu, l’Afrique du Sud, le Kenya et l’Égypte dominent largement la scène continentale, occupant les trois premières places du classement. Le Maroc, lui, progresse doucement mais sûrement, avec une dynamique de croissance qui attire l’attention des analystes.
Mise de fonds
Cette progression intervient dans un contexte où le financement des startups en Afrique connaît une nette contraction. En 2024, les jeunes pousses africaines ont levé 2,2 milliards de dollars, soit une baisse de 25% par rapport à 2023, et même de 52% comparé à 2022, selon le rapport annuel d’Africa: The big Deal, une initiative dédiée à l’analyse et au suivi des financements des startups africaines.
Malgré cette chute globale, le Maroc a enregistré 70 millions de dollars levés en 2024, un montant qui le place au 5ème rang continental, juste derrière les géants que sont le Kenya (638 millions), le Nigeria (410 millions), l’Égypte (400 millions) et l’Afrique du Sud (394 millions). Ces quatre pays concentrent à eux seuls près de 84% des financements du continent, illustrant un déséquilibre structurel dans la répartition des capitaux.
En Afrique du Nord, les investissements dans les startups ont atteint 478 millions de dollars en 2024, en recul de 35% sur un an. L’Égypte, qui pèse à elle seule 84% de cette somme, a vu ses financements chuter de 37%. Le Maroc, de son côté, a relativement bien résisté à cette tendance baissière, mais pas suffisamment pour compenser le recul régional.
Ces données révèlent aussi une forte concentration des financements: en 2024, la moitié des sommes levées sur le continent a été captée par seulement dix entreprises, et seules 188 startups ont levé un million de dollars ou plus.
Malgré ce contexte difficile, 2025 semble amorcer un rebond. Sur les cinq premiers mois de l’année, les startups africaines ont levé plus d’un milliard de dollars, soit 40% de plus qu’à la même période en 2024.
Que font les autres?
À l’échelle du continent, le Maroc reste néanmoins distancé par des écosystèmes plus matures. L’Afrique du Sud, qui conserve la première place continentale, maintient une position stable malgré une croissance plus modeste cette année. Son écosystème, réparti entre Le Cap et Johannesburg, est soutenu par des géants privés comme Naspers et a déjà donné naissance à plusieurs licornes locales.
Le Kenya, de son côté, fait un retour remarqué dans le haut du classement, grimpant à la deuxième place africaine grâce à une croissance de plus de 33%. Nairobi, son cœur névralgique, concentre presque toute l’activité du pays et attire les géants mondiaux de la tech comme Google ou Microsoft.
Là où le soleil se couche
L’Égypte, avec une population dépassant les 110 millions d’habitants, capitalise sur son marché intérieur et sur une culture entrepreneuriale ancienne. Le Caire, désormais dans le top 90 mondial, domine nettement l’écosystème nord-africain.
Enfin, la Tunisie, qui a longtemps été perçue comme l’un des écosystèmes les plus prometteurs du Maghreb, semble aujourd’hui marquer le pas. Malgré un bon cadre légal et des structures de soutien solides, comme le Startup Act ou le fonds InnovaTech, sa croissance reste inférieure à celle de ses voisins.
Face à ces géants, le Maroc joue la carte de la progression constante. Il ne rivalise pas encore en taille de marché ni en nombre de licornes, mais il bénéficie d’un atout non négligeable: sa stabilité, sa jeunesse de plus en plus connectée et une volonté politique affirmée de faire du digital un levier stratégique.
Si le pays parvient à décentraliser ses hubs, à mieux financer ses jeunes pousses en phase d’amorçage et à encourager l’innovation inclusive, il pourrait bien viser, à moyen terme, le top 5 des écosystèmes africains.