En mars dernier, le Conseil économique, social et environnemental a rendu un avis intitulé « Minéraux stratégiques et critiques : un secteur au service de la souveraineté industrielle du Maroc ». Et cet avis est d’une importance indéniable, non seulement à l’heure actuelle, mais aussi et surtout pour l’avenir de notre pays, qui cherche à se faire une place parmi les nations émergentes, et pourquoi pas à monter dans les rangs des développés. Rien ne nous empêche d’y penser, car des pays qui, il y a quelques décennies, étaient comme les nôtres, ou moins qu’eux en termes de développement, nous dépassent aujourd’hui largement, et la Corée du Sud est souvent citée à cet égard. Bien sûr, il n’y a pas de mystère là-dedans. C’est une question de volonté politique, de sérieux et d’engagement des différents acteurs, puis de planification et de bons choix économiques.
Conformément à l’esprit et à la logique du nouveau modèle de développement, visant à renforcer la souveraineté du pays dans les domaines industriel, alimentaire et autres, et à accélérer le rythme de la transformation énergétique et numérique, le Conseil économique, social et environnemental a sélectionné onze domaines d’activités à dimension stratégique, à savoir : technologies numériques et électroniques, moteurs et matériaux magnétiques permanents, robots Véhicules électriques et batteries, Industries aéronautiques et de défense, Énergie solaire, Énergie éolienne, Technologies de captage et de stockage du carbone, Sécurité alimentaire, Technologies de l’hydrogène vert, Santé et Médicaments. Après cela, une liste préliminaire de minéraux stratégiques et critiques qui seront nécessaires au développement des onze professions susmentionnées a été établie, avec la mise en garde qu’il n’y a pas de définition unifiée des minéraux stratégiques et critiques, car chaque pays a sa propre définition et établit sa propre liste.
Au total, une liste de 24 minerais stratégiques et critiques pour le Maroc a été retenue. Globalement, cette liste nécessite une mise à jour régulière, pour tenir compte des évolutions technologiques, économiques et géopolitiques mondiales, mais aussi des progrès de l’exploration minière et de l’identification de nouveaux gisements.
Un examen de la liste des minerais critiques du Maroc révèle de nombreuses vulnérabilités qui menacent la durabilité des approvisionnements et qui doivent être traitées pour assurer des voies de développement ciblées. Ainsi, sur les 24 minerais stratégiques et critiques recensés, le Maroc apparaît totalement dépendant des importations pour environ 17 d’entre eux, soit 74% de la liste. Il concerne les terres rares (terres rares), le titane, l’aluminium, le graphite, le tungstène, le soufre, la magnésite, le molybdène et la potasse.
En outre, il existe un niveau élevé de concentration géographique des fournisseurs de plusieurs minerais critiques au Maroc, ce qui accroît sa dépendance et sa vulnérabilité en termes d’approvisionnement compte tenu du nombre limité de pays fournisseurs. En effet, le Maroc est totalement dépendant des pays étrangers pour 17 minerais critiques, ce qui représente plus de 70%, dont 12 minerais connaissent un très haut degré de concentration géographique des producteurs mondiaux. Il concerne les terres rares, le tungstène, le graphite, le lithium, l’aluminium, le germanium, le niobium, la magnésite, le chrome, le silicium, le borate et le molybdène. Cette dépendance a été exacerbée par l’instabilité politique que connaissent certains des principaux pays producteurs.
De plus, à l’exception des phosphates et de certains minerais, le secteur extractif national en général reste très isolé et a des liens très faibles avec le secteur industriel. L’examen de la balance commerciale des minerais stratégiques et critiques, dont le Maroc ne dispose pas d’une production nationale significative, montre que pour 14 minerais, les importations sont constituées à 90% à 100% de produits raffinés, transformés ou transformés, plutôt que de produits bruts ou concentrés .
Cependant, le rapport n’a pas négligé d’identifier un certain nombre de faiblesses liées au secteur minier dans son ensemble, telles que : l’absence d’une vision pour financer le plan « Mines Marocaines », le risque dans l’avenir dû au manque de compétences dans les métiers miniers, le manque de synergie et l’absence de budgets de recherche et développement dans le secteur minier, ce qui oblige les entreprises à prendre en charge des activités d’innovation, en plus des difficultés à obtenir des financements pour les entreprises minières marocaines, surtout de petite taille, moyennes et micro-entreprises.
L’extraction des déchets est un enjeu majeur pour l’ensemble de l’industrie minière en raison de ses impacts environnementaux et sanitaires, ainsi que des enjeux fonciers qui peuvent constituer un frein au développement des bassins miniers. L’industrie minière est également une source de pollution de l’eau, en raison des grandes quantités d’eau utilisées dans les mines et le lavage des minéraux, des eaux usées et des déchets solides générés par cette industrie après l’extraction et le traitement des matières premières.
L’avis du Conseil économique, social et environnemental se termine par une série de recommandations articulées autour de six axes prioritaires, qui permettront d’améliorer la triple performance du secteur minier de manière simultanée sur les plans économique, social et environnemental, tout en placer les minerais stratégiques et critiques au cœur de la souveraineté industrielle du pays.
Améliorer le cadre stratégique et institutionnel qui régit les activités liées aux minerais stratégiques et critiques et renforcer la gouvernance du secteur.
Éliminer les risques du secteur minier pour les investisseurs et améliorer son attractivité.
Renforcement et amélioration de la productivité du secteur sur la recherche et le développement, sur le capital humain et l’organisation des petites, moyennes et micro-entreprises.
Sécuriser les chaînes d’approvisionnement essentielles en minerais et réduire la vulnérabilité aux sources externes
Renforcer l’évaluation nationale des minéraux stratégiques et critiques afin de mieux se positionner dans les chaînes de valeur
Renforcer le caractère global et durable du secteur minier
Bref, ces recommandations constituent une véritable feuille de route susceptible d’assurer un meilleur positionnement de notre pays dans les chaînes de valeur mondiales. Et tout cela dans un contexte caractérisé par une compétition intense entre les différentes puissances pour sécuriser leurs approvisionnements en minerais stratégiques.
Traduit en arabe par Abdul Aziz Baoudar.
Rédigé par : Dr Abdul Salam Al-Siddiqi
Marrakech, 2023-04-19 19:32:34 (Maroc-Actu) –